Le tourisme et basta ! J’ai choisi ce titre provocateur qui peut se traduire en bon français par « Pour la Corse, le tourisme, point barre », parce qu’il illustre parfaitement pour moi les propos tenus dans cet entretien avec le quotidien Corse matin, par le président du Cercle des Grandes Maisons, association des 21 résidences hôtelières de plus de quatre étoiles , dont une seule n’est pas située sur le littoral..
Le président de l’association, Monsieur Marcellesi est le propriétaire de l’Hôtel Casadelmar *****, situé à Porto Vecchio, qui a défrayé la chronique judiciaire il y a quelques années dans une affaire ou intervient un oligarque russe sulfureux , et il y a quelques mois ou il a été condamné par le Conseil d’Etat pour avoir installé sans autorisation des transats et un ponton non démontable sur une plage publique.
Il est en même temps un important promoteur immobilier du sud de la Corse.
J’ai trouvé que dans le ton, comme le fond, de l’auteur ces propos , transpirent une arrogance , une suffisance, assez extraordinaire, en même temps que l’amère déception de constater que c’est Gilles Siméoni qui aura pour les six prochaines années la main sur la politique économique de notre Île, celui qu’il avait fustigé publiquement l’année dernière lorsqu’il avait plaidé pour que les touristes souhaitant venir en Corse disposent d’un « Green Pass ».
Il faut dire qu’il est l’un des soutiens les plus importants de Jean Christophe Angelini , Maire de Porto Vecchio, dont l’échec électoral aux elections territoriales a sans aucun doute mis un coup d’arrêt aux ambitions qu’il nourrissait pour sa conception du développement touristique de la Corse .
Je passe sur la proposition de fusionner l’Agence du Tourisme de la Corse avec l’Agence de Développement Economique de la Corse, et l’Office des Transports qui traduit parfaitement sa proposition de subordonner le développement de l’Île à l’industrie touristique et, dans le même temps, de prendre le contrôle des enveloppes budgétaires consacrées au développement et au système de transport.
Autrement dit, de porter à la perfection ce qui a été réalisé en matière de transport de marchandises et de passagers, pour permettre à une poignée d’hommes d’affaires corses d’avoir la haute main sur l’essentiel de l’économie insulaire , et donc sur le destin de nos compatriotes !
J’en connais qui vont regretter le colonialisme de papa en réalisant ce qui est en train de germer dans le cerveau de certains de nos entrepreneurs les plus en vue ..
Il a cependant raison lorsqu’il plaide pour une nouvelle orientation de la politique touristique de l’Assemblée de Corse. J’ai déjà dit, ici, qu’il est pour moi indispensable d’infléchir la voie choisie jusqu’ici par les différentes majorités politiques qui se sont succèdées depuis une vingtaine d’années.
J’ai vécu 30 ans à Porticcio, station touristique de la rive sud du Golfe d’Ajaccio, et je n’y était plus retourné l’été depuis plus de 15 ans. Ce que j’ai vu la semaine dernière est un désastre, un monumental gâchis sur le plan environnemental et urbanistique, pour ne pas en rajouter aujourd’hui..
Alors que notre Île devrait viser l’excellence pour se distinguer des destinations concurrentes, c’est la médiocrité qui a été visiblement choisie, à Porticcio comme dans plusieurs stations littorales, qui ne sont que la pâle copie de ce que l’on trouve de plus ordinaire sur les côtes du Languedoc et du Var.
Le président du Cercle des Grandes Maisons corses, ça crève les yeux dans cet entretien, entend visiblement à ce titre dicter la politique touristique de la Corse à ceux qui en ont la charge, c’est à dire aux élus du peuple.
Je ne conteste pas, bien entendu, les compétences pas plus que la réussite de ceux qui ont effectivement développé en Corse des établissements touristiques de prestige.
Mais l’excellence, ce n’est pas le luxe, c’est un peu plus compliqué, c’est aussi le souci sourcilleux de l’intérêt général , qui ne se confond pratiquement jamais avec l’intérêt d’un groupe , ni d’une entreprise aussi créative et profitable soit elle ..
Dans son propos le porte parole des Grandes Maisons Corses, car c’est ainsi qu’ils se définissent, évoque la création de valeur, le développement économique, le développement golfique , effectivement suspendu depuis trop longtemps, mais jamais la solidarité envers les laissés pour compte de cette politique, pas plus que la solidarité entre les micro régions que la nature a favorisées et celles qu’elle a laissé de coté.
La théorie du ruissellement, chère à nos entrepreneurs et au gouvernement, ça ne marche pas plus dans l’industrie touristique que dans le reste de l’économie, et avant d’infléchir, comme le souhaite apparemment Gilles Siméoni, notre politique touristique il est indispensable, sinon vital, d’établir les Comptes du Tourisme , de chiffrer sérieusement son apport et son coût pour la collectivité , et de déterminer à qui profite la politique suivie aujourd’hui et combien elle rapporte à ceux auxquels elle profite le plus, et qui elle laisse sur le bord de la route ramasser les miettes qui sont également à chiffrer sérieusement.