La deuxième circonscription de Haute Corse défraie la chronique dans des circonstances qui rappellent désagréablement des méthodes que l’on pouvait croire dépassées.
Passons sur l’investiture surprenante du candidat giacobbiste par LREM , sur les inscriptions menaçantes tout aussi surprenantes sur le mur d’une maison isolée de la commune de Ghisonaccia, le désistement des deux autres candidats giacobbistes sans la moindre consigne de vote en faveur de leur collègue de la majorité départementale, et bien sûr les graves menaces qui ont poussé l’un d’entre eux à jeter l’éponge.
Ces menaces, il faut le souligner, avaient été précédées de pressions couronnées de succès sur le suppléant de ce dernier, pour le pousser à abandonner la compétition ce qui devait entraîner d’office l’abandon du candidat.
Ce dernier incident a ravivé chez moi des souvenirs douloureux et m’amène à me poser nombre de questions.
Le 16 mars 1986 devaient se dérouler les elections législatives, pour la première fois sous la Vème République au scrutin proportionnel départemental : mon camarade Jean Motroni, candidat du PS m’avait demandé d’être son suppléant , ce que j’avais accepté.
En février 1986 mon père Xavier , alors maire d’Aléria , décédait brutalement dans un accident de la route . J’étais moi même à l’époque conseiller général de Haute Corse lorsque le conseil municipal me demanda de faire acte de candidature à l’élection fixée 15 jours plus tard.
Alors que je me préparais la mort dans l’âme à affronter l’élection municipale, je reçois le 15 février un coup de fil de Jean Zuccarelli, alors maire de Bastia, dont le fils Emile était pour la première fois candidat aux législatives, me demandant de passer d’urgence le voir à Bastia car selon lui la situation difficile de son fils nécessitait mon intervention.
Je ne sais ce qui me poussa à demander à deux habitants d’Aléria, dont un pilier local du parti que l’on appelait alors MRG, ami de mon père, de m’accompagner, mais je fus en la circonstance particulièrement inspiré.
Je trouvai en effet, à ma grande surprise, au domicile du maire de Bastia, outre celui ci, François Giacobbi alors sénateur président du Conseil Général.
Après les amabilité d’usage, ce dernier, excipant des difficultés imaginaires auxquelles se heurtait le candidat de son parti me demanda tout de go de démissionner de la suppléance afin de provoquer la démission de Jean Motroni qui n’aurait plus le temps de trouver un suppléant.
Devant ma stupéfaction assortie de mon refus immédiat et catégorique , Giacobbi me déclara que dans ces conditions il y aurait la semaine suivante un candidat contre moi à Aléria, ce qui ne changea naturellement rien à mon refus de me rendre à son dictât.
Je ne répéterai pas ici les propos alors tenus par l’ami de mon père pourtant pilier du MRG à Aléria à l’encontre des deux hommes , je laisse à chacun le soin de les imaginer, car c’était un vrai corse, digne et droit.
Naturellement la menace ne fut pas mise à exécution, mais le chantage odieux de ces deux hommes alors que j’avais mis mon père en terre quelques jours auparavant, m’a ouvert les yeux sur la véritable nature de cette bourgeoisie claniste et clientéliste qui a préempté la gauche en Corse , et n’a jamais eu d’autre projet que celui de se perpétuer au pouvoir dans notre Île.
J’ai décidé ce jour là de la combattre sans concessions.