J’ai parcouru attentivement le texte du communiqué du FLNC publié cette semaine par le quotidien Corse Matin, et je suis saisi par la perplexité en m’essayant à interpréter les vues de l’organisation clandestine.
J’ai toujours manifesté mon opposition à la violence clandestine, et je n’ai pas changé d’avis, même si je dois reconnaitre qu’à un moment donné elle évité que la Corse ne soit livrée sans défense aux prédateurs de la finance nationale et internationale.
Sans en exagérer la portée, j’ai trouvé dans ce document deux raisons d’espérer un vrai changement d’état d’esprit dans la mouvance radicale du mouvement nationaliste, en même temps que des contradictions qui interdisent, du moins pour le moment, d’en espérer davantage.
la première c’est ce qui constitue pour moi une timide, mais réelle, approche d’un droit d’inventaire sur les réalités de la lutte armée.
Je toujours pensé que l’erreur des nationalistes corses partisans de la lutte armée a été de penser qu’il suffisait d’une « avant garde armée » pour affronter les problèmes dont chacun commençait à mesurer l’ampleur et la menace qu’ils allaient faire peser sur la Corse et son peuple.
En cédant à cette approche, un peu comme si ils entendaient s’inspirer de l’expérience des nationalistes algériens du FLN, ils ont en réalité désarmé la citoyenneté, et en quelque sorte contribué à décerveler les corses, peut être suis je là un peu sévère, et à les déposséder de leur capacité à développer l’initiative citoyenne sans laquelle il ne saurait y avoir de vrai changement politique..
La proposition de création des conditions de mise en place d’une « plateforme patriotique de résistance » transcendant les partis politiques, les syndicats , présentée comme une alternative politique , revient à le reconnaitre formellement sinon de manière plus explicite.
La seconde, c’est la reconnaissance quant à elle explicite, de la responsabilité indiscutable des corses dans la situation qui a préparé et facilité leur effacement progressif sur leur terre.
Cette reconnaissance vient pour moi un peu tard même si elle est indispensable, car il ne suffit pas de désigner un bouc émissaire, en l’occurrence chez nous le français ou l’immigré, pour rassembler tout un peuple , lui faire prendre conscience de son destin, et lui demander d’agir en conséquence, et le reconnaitre constitue un progrès.
De la même façon que désigner les « nouveaux promoteurs corses » et leur rapacité , revient à reconnaitre qu’il n’y a pire colon que celui qui revendique partager avec vous le même sang et les mêmes valeurs, revient à reconnaitre, à la marge, une faiblesse originelle du projet politique qui, en projetant de faire de la Corse une nation, a fini par gommer la frontière entre exploiteurs et exploités dans notre île et à considérer , comme dans le fameux film de Jean Yanne, que « si tout le monde il est corse, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».
D’autant qu’en parcourant la liste des derniers attentats revendiqués dans le même communiqué, je n’ai trouvé aucun élément qui démontre qu’au delà des proclamations que j’ai saluées, il existe une véritable inflexion à la ligne traditionnelle de l’organisation clandestine.