Je ne crois pas que Marine Le Pen sera élue présidente de la République en mai 2017. Par contre, ce que je crois, ce que je constate, c’est que ses idées les plus nauséabondes et les plus rétrogrades ont quant à elles déjà gagné.
C’est très mauvais pour notre démocratie, mais ce n’est pas forcement très bon pour le FN: en effet, c’est une règle jamais démentie que celle qui fait que quand un parti voit ses idées diffuser sans parvenir à s’imposer il finit par s’étioler et perdre son attrait.
On dit souvent que les électeurs du FN le rejoignent par peur du déclassement, et c’est sans doute vrai, même si ce n’est pas une explication suffisante.
Ce dont je suis convaincu pour ma part, c’est que le succès du FN et des autres formations populistes ne résulte pas seulement d’une somme de comportements individuels, mais qu’il tient surtout à ce que c’est d’abord la France elle même qui souffre de la peur du déclassement et que le traumatisme est profond.
C’est bien sûr une peur fondée, même s’il n’a jamais servi à rien d’avoir peur, car le monde dans lequel nous évoluons a profondément changé et que les cartes de l’influence d’un pays, qu’elles soit économique, politique culturelle ou que sais je encore, ont été rebattues et le seront encore dans une proportion que nous ne maîtrisons pas.
Nous sommes certes encore une puissance qui compte dans de nombreux domaines , mais d’autres émergent, sur le continent asiatique ou américain qui tôt ou tard viendront nous disputer notre rang , et ce qui peu ou prou lui est associé comme avantages ou privilèges.
Que faire donc devant cette situation ? D’abord la regarder bien en face: ce que je reproche à nos dirigeants ce n’est pas leur incapacité à réduire le chômage ou à améliorer sensiblement la situation économique.
Ce que je leur reproche c’est de ne pas avoir le courage de dire la vérité à nos concitoyens, de leur mentir et par conséquent de ne pas les préparer à affronter une situation qui , j’en suis convaincu n’est pas dramatique, et qui au fond est loin d’être nouvelle..
Un exemple ? Sous le règne de Louis XIV , au XVIIème siècle, la France était, et de loin, le pays le plus peuplé d’Europe. Il était considéré à l’époque comme le plus puissant économiquement et militairement de l’occident.
Tout cela est fini depuis longtemps , et pourtant notre pays a continué de se construire, dans un monde certes limité, mais qui a traversé, toute proportion gardée, des situations aussi désordonnées que celles qui se dessinent sous nos yeux : les guerres napoléoniennes, la première et la deuxième guerre mondiale, l’occupation nazie , j’en passe et des meilleures.
Cette incapacité , je devrais dire cette lâcheté, de nos dirigeants, outre qu’elle est proprement inadmissible par elle même a eu une conséquence autrement plus dramatique: celle de laisser croire que c’est dans un repli frileux sur des frontières dépassées, accroché à un passé révolu, que se trouvait la solution.
Les partis et mouvements populistes se sont engouffrés dans la brèche, et il va nous falloir traverser beaucoup d’épreuves pour en sortir, et survivre, j’en suis convaincu, très honorablement.
J’attend de nos dirigeants, et singulièrement de ceux qui appartiennent à ma famille politique, qu’ils sachent se montrer à la hauteur qu’exige la situation: je ne tarderai pas à être fixé sur leur capacité à s’y hausser.